Le Chef de l’Etat, le Président Patrice TALON était face à la presse le jeudi 8 février 2024. Objectif, répondre aux préoccupations des professionnels des médias. Et dans le lot des préoccupations abordées, figurait celle relative à son retour en 2026. Sur cette question, voici le verbatim de l’actuel locataire de la Marina.

« C’est vrai, j’ai pu noter avec vous que, depuis un moment, bien avant que le député du « Bloc Républicain (BR) » ne soumette sa proposition de loi Constitutionnelle, j’ai entendu comme tout le monde que, depuis quelque temps, on confond notre réalité au Bénin avec celle de l’Afrique ou de la sous-région, qui donne le sentiment qu’à la fin des deuxièmes mandats, qui sont prescrits comme derniers mandats des présidents en exercice, les concernés tentent de briguer un troisième mandat, avec divers prétextes. Cela a tellement traumatisé les peuples africains que, désormais, on soupçonne tout le monde à la fin du deuxième mandat, de chercher les voies et moyens pour contourner les dispositions constitutionnelles que, pourtant, tout le monde accepte dans les consignes, dans les Constitutions, et puis à la fin, on trouve les moyens de chercher un troisième et un quatrième mandat.

Mais moi, j’ai quand même espéré que cette question est derrière nous depuis un temps. Le Bénin fait son chemin. C’est vrai, nous n’avons de leçon à donner à personne, mais nous faisons notre chemin de façon admirable, n’est-ce pas ? En tout cas, de la manière dont nous-mêmes observons nos efforts. Il y a quelques années, à l’occasion de la dernière modification de notre Constitution, – on a fini par faire cet exercice-là parce que quand un président est en exercice, il lui est pratiquement interdit de toucher à la Constitution quel que soit le motif, parce qu’on le soupçonne de placer une virgule à titre de modification et puis, de décréter que c’est une nouvelle Constitution ou une nouvelle République, pour remettre les compteurs à zéro, le compteur de décompte des mandats – donc, depuis 2019, nous avons espéré avoir réglé définitivement cette question-là au Bénin. Et à mon initiative, nous avons précisé dans la Constitution que, « nul ne peut, de sa vie, exercer plus de deux mandats ». Que la Constitution soit nouvelle, qu’il s’agisse d’une nouvelle République, qu’il s’agisse de quoi que ce soit, aucun vivant au Bénin ne peut faire plus de deux mandats en qualité de président de la République.

Et nous avons tous pensé qu’une fois que cela est inscrit dans notre Constitution, ou bien toutes les fois que cette phrase reviendra dans n’importe quelle Constitution, qu’elle soit nouvelle, modifiée ou non, toutes les fois que cette phrase figurera dans la Constitution, il n’y aura plus aucune raison de soupçonner un président en exercice de vouloir faire un troisième mandat. C’était passé pour être acquis. Puis, la fin s’annonçant, on revient encore sur cette question comme si cet acquis, cette phrase qui est dans la Constitution, soit on s’apprête à l’évacuer, à la sortir de la Constitution, même si elle demeure dans la Constitution, elle n’est plus suffisante pour nous apaiser sur cette question. C’est malheureux.

En fait, ce sont les acteurs politiques qui agitent cela, juste pour se donner une raison d’exister, pour créer de la polémique, pour animer le débat politique avec un sujet qui, en fait, n’en est pas un.

La question que vous me posez, monsieur Aplogan, vous êtes journaliste. Et je vais commencer par vous répondre, parce que moi, j’ai lu le document en question, la proposition de loi. Et je n’ai pas vu, dans ladite proposition, qu’il souhaite qu’on extirpe ou qu’on sorte de la Constitution, cette phrase-là : « Nul ne peut, de sa vie, exercer plus de deux mandats ». De sa vie ! Qu’il s’agisse d’une nouvelle Constitution ou non ! Mais tant que cette phrase demeure dans la Constitution, il n’y a aucune raison qu’on me soupçonne de vouloir faire comme tout le monde, comme cela se passe ailleurs, d’autant que c’est moi qui ai pris l’initiative, il y a quelque temps.

Alors, est-ce qu’à l’occasion de cette retouche ou cette petite modification technique, les gens seront tentés d’enlever la phrase de la Constitution ? C’est peut-être cela la crainte de ceux que j’estime être de bonne foi. Attention ! C’est une bonne phrase qui est dans la Constitution. C’est très bien. Mais, est-ce qu’à l’occasion de l’examen d’une retouche technique, les uns et les autres ne seraient pas tentés d’enlever cette phrase-là ? Je crois que personne au Bénin ne pourra le faire. Personne au Bénin ! Il n’y a pas un Béninois sur les bientôt treize (13) millions que nous sommes bientôt, qui veuille bien que cela se passe. Personne ! A commencer par moi-même ! Donc, je voudrais que les Béninois, que ce soient les acteurs politiques, civils, les enfants, les jeunes, les personnes âgées, je voudrais que tout ce qui est désormais un acquis pour notre pays, notre peuple, nous le préservions tous, et que nous ne rentrions pas dans des débats politiciens pour remettre en cause nos acquis communs pour lesquels nous avons du mérite collectivement. Ce n’est pas bien. Cela nous salit tous. Cela remet en cause nos efforts de réforme. Et cela donne l’impression que le Bénin n’a pas changé. Ce n’est pas vrai. C’est à chacun de nous, surtout vous, de rappeler les gens à l’ordre, si je peux utiliser l’expression, pour dire : « Non ! Le Bénin n’est plus à cela près. C’est fini ». »